Raphaële Bouchet sur «Piano Panier ou La recherche de l'équateur»

Patricia Plattner n’aimait pas beaucoup son premier long métrage, « Piano Panier », tourné au Portugal. A sa sortie en 1989, elle en relevait les « maladresses », disait qu’elle aurait volontiers réécrit le scénario et repensé le découpage. C’était juger bien sévèrement un film dont le charme opère longtemps après son visionnement.

Deux amies que tout oppose passent un mois ensemble dans la région de Porto. Marie, suissesse, pianiste, cherche une échappatoire à une liaison délétère. Filipa, portugaise, s’apprête à se marier. C’est avant tout leur amitié rêche et fusionnelle qui intéresse la cinéaste. D’emblée, on est frappé par la radicalité de la mise en scène, qui envisage les deux femmes avec distance et gourmandise, comme si elles étaient seules au monde. Leur phrasé ciselé rappelle, de loin, l’ironie douce des dialogues de Rohmer.

Sans lourdeur ni caricature, Patricia Plattner ancre son récit dans un paysage qui se refuse au pittoresque : du Portugal, elle filme surtout les murs décrépits et les terrains vagues. Même les somptueuses plages ne semblent que renvoyer les protagonistes à un horizon fermé. Elles sont si jeunes et déjà si peu libres. Ne leur reste que la « saudade ». Et la sororité.