Anita Hugi sur «Il valore della donna è il suo silenzio»

Que se passe-t-il derrière les rideaux à fronce des conventions sociales ? Comment vit-on derrière un mur de silence ? Comment peut-on vivre, se développer, quand on est rivé au foyer et aux fourneaux – en particulier dans un environnement migratoire où il est difficile, notamment pour des raisons de langue, de briser ces murs ?

Dans les années 1970, Gertrud Pinkus habitait dans un quartier de Francfort où vivaient beaucoup de familles italiennes – mais elle ne voyait jamais, nulle part, les femmes et les mères dans les bistrots. Du coup – comme l’écrivaine Adelheid Popp cent ans avant elle - elle a pris son carnet à la main, ou plutôt son magnétophone et est allée de porte en porte pour enregistrer les histoires des voisines invisibles.

Il en est résulté un des films suisses parmi les plus émouvants et les plus novateurs que je connaisse – quant au fond et à la forme : le film «Il valore della donna è il suo silenzio». Un film comme un roman d’Ignazio Silone. Un essai, tout à la fois fiction et documentaire. Une histoire qui prend aux tripes – et a donné une voix aux femmes dont la plus grande vertu devait être le silence. Rompre le silence – tout en préservant l’intimité. Gertrud Pinkus nous montre ici comment le respect rime avec la révolution et réciproquement.